UN REQUIEM DE RÉFÉRENCE

Mariss Jansons ajoute son nom à la très courte liste des chefs qui ont su restituer le « Requiem » de Mozart avec autant de flamme que d’humilité.

Cette nouvelle interprétation renoue avec les grandes versions " mo – dernes ", au firmament desquelles trônent, hiératiques, les témoignages de Walter, Davis, Böhm ou Giulini. Mariss Jansons dispose en effet de l’ensemble des ingrédients qui ont fait la grandeur de ces lectures : un choeur irréprochable de ductilité, de vigueur et de finesse, un plateau de solistes superbe et un orchestre puissant et détaillé. Mais la réunion de ces ingrédients ne suffit pas à faire une grande interprétation, comme l’a démontré la lecture décevante d’Abbado (DG) également captée en " live ". Il faut une vision et la capacité à la transmettre aux musiciens pour que la magie opère, qualités dont dispose incontestablement Jansons. Une vision moderne qui opère une synthèse éblouissante entre classicisme et romantisme, entre apaisement et terreur, entre théâtralité et introspection.
Les premières mesures de l’Introitus se déploient sur un tempo alerte proche de celui de Marriner (Philips), la texture orchestrale raffinée soutient l’épanouissement des choeurs, d’une délicatesse et d’une précision admirables. Le choeur de la Radio des Pays-Bas est à l’aise pour soutenir la violence explosive qui innerve le Dies Irae ou le Confutatis, sans que cette puissance ne vienne brouiller la clarté contrapuntique, rehaussée par la remarquable qualité de la prise de son, précise et naturelle. Sous la direction inspirée de Jansons, l’Orchestre du Royal Concertgebouw déploie sa fastueuse palette de couleurs, les cuivres et les timbales sont mobilisés sans excès, ses cordes sollicitées avec maestria pour accentuer la dramatisation de certains épisodes et les variations dynamiques toujours choisies à l’aune de leur puissance expressive. Enfin, le quatuor de solistes participe grandement à la réussite de l’ensemble comme l’illustre un magnifique Tuba mirum, profond et équilibré ou un Benedictus émouvant, soutenu par le bel entrelacement des voix. Voilà donc une nouvelle version de référence qui pourrait bien réconcilier les amateurs de lectures sur instruments modernes et les thuriféraires des formations baroques.