LA COULEUR HISPANIQUE D’ERNESTO LECUONA

Marcos Madrigal apporte à ces musiques américaines un jeu très orchestral.

Mélodies américaines (au sens très large du mot), effluves de Granados, chansons populaires stylisées… Nous découvrons grâce à ce disque la richesse de cette musique. Chez Lecuona, on ressent d’autres influences, comme celle des jazzmen (il travailla à New York). Ces pièces afro-cubaines ne sont par conséquent jamais longuement appuyées. Elles jouent des effets d’échos, d’éloignement que la prise de son très " ouverte " restitue librement.L’écriture, composée souvent d’arpèges très rapides tenus par des accords qui puisent au fond des basses, est profondément hispanique (la Suite Andalucia).
La pulsation du rythme est à la fois naturelle, produite par l’élan de tout le corps, mais aussi raffinée par la multitude d’accents, de dynamiques qui accroissent la sensualité des timbres (on retrouve cela chez Gottschalk) et restituent les couleurs fauves des danses mais aussi l’esprit de la zarzuela. Lecuona composa de nombreuses mélodies (il accompagna et enregistra avec divers chanteurs) dont les parfums croisent aussi le répertoire classique. Il fut aussi un virtuose admiré de Paderewski, Rubinstein et Gershwin. La beauté du piano et de l’interprétation emporte l’adhésion. Pianiste cubain, ressentant cette musique dans ses veines, Marcos Madrigal possède un son très personnel, une manière d’orchestrer le clavier que l’on retrouve chez Jorge Bolet et José Luis Prats. Bien qu’il existe divers enregistrements de la musique de Lecuona (notamment une intégrale Bis), et à l’exception des témoignages " historiques " du compositeur lui-même, Marcos Madrigal domine sans conteste la discographie. Une seule petite réserve : l’absence de livret en français (le label est parisien) en dit long sur le marché hexagonal…