Laurent Petitmangin publie « Ce qu’il faut de nuit », paru à la Manufacture de livres, excellente maison d’édition devant l’Eternel ! C’est mon choix de la semaine.
La Lorraine, ravagée par le chômage de masse et le racisme, au cœur de « Ce qu’il faut de nuit »
Ils sont trois : le père cheminot et les deux fils. Gillou le cadet est prometteur. Bosseur, sérieux. Il ira loin. L’aîné, on a oublié son vrai prénom. Depuis ses trois ans, on l’appelle « Fus », le diminutif de football, comme on dit chez les Luxos, les Luxembourgeois tout proches. Depuis la mort de la mère, ces trois là subissent leur quotidien désenchanté dans une Lorraine ravagée par le chômage de masse et le racisme galopant. Leur bonheur, c’est le match du dimanche, avec un Fus transfiguré sur la pelouse, le père et le frère hurlant dans les gradins. Ca aurait pu durer comme ça, dans un entre deux ni heureux ni malheureux. Mais non. Parce que Fus, à force de désœuvrement, rencontre des types pas fréquentables.
A lire aussi
Ce qu’il faut de nuit a remporté le prix Stanislas 2020, le prix Feuille d’or des Medias 2020 ainsi que le prix Georges Brassens 2020.
Pour faire court, il s’agit de fachos, rangers/treillis/crâne rasé. Ca commence par des beuveries. Ca dégénère assez vite, à coups de barre de fer. Et ça finit aux Assises. Voilà l’histoire, somme toute d’une effroyable banalité. Et pourtant c’est un éblouissement, une révélation littéraire absolue, déjà saluée par plusieurs prix. Ca s’appelle « Ce qu’il faut de nuit », un premier roman écrit par Laurent Petitmangin, à 55 ans passés ! Son style est magnifique, simple, évident et juste. L’histoire est bouleversante. Sa fin est terrible. En 190 pages, Petitmangin en dit autant, sur un thème proche, que l’avant-dernier Goncourt en 5OO (Leurs enfants après eux, de Nicolas Mathieu). C’est l’un des grands romans français de l’automne.
Bernard Poirette