John Tavener est-il un compositeur religieux ? : " Je ne peux pas séparer la musique de la Foi. Pour moi, composer, c’est comme prier. Ma musique est à la fois une glorification de Dieu et une pénitence, un repentir et, je suppose, une manière de revenir à mes origines ". Hormis un concerto pour violoncelle, The Protecting Veil (1987) et un quatuor à cordes, The Last Sleep of Virgin (1991), l’essentiel de sa musique est vocale. " Je suis très préoccupé par la voix, alors que la plupart des musiques d’aujourd’hui ne conviennent guère à la voix humaine. Même lorsque j’imagine une partition pour l’alto de Yuri Bashmet, ou pour un violoncelle, ou une clarinette, je ne compose pas au piano, j’écris pour ma voix. C’est elle qui dirige toute ma musique ". Des influences byzantines se retrouvent dans plusieurs de ses partitions, en particulier dans l’Akathist of Thanksgiving enregistré récemment, et conçu : " comme une icône musicale ". " La musique byzantine est difficile à lire pour un Occidental, mais je l’étudie et j’en écoute souvent. En composant, j’essaie de recréer l’esprit de cette musique et retrouver La Voix de la tradition qui passe à travers nous. Mais je ne veux ni imiter ni copier ce qui est ancien – ce serait mortel ! Ma musique est abstraite, mais chaque note peut s’expliquer d’un point de vue non seulement musical ou mathématique, mais métaphysique. Elle correspond à mes racines, qui sont aussi bien grecques, que soufi ou indiennes. En allant d’une tonalité à une autre, ma musique change d’état spirituel. Dans cette quête, l’homme a peut-être été le plus loin possible, en atteignant un sommet avec Beethoven. Après, la musique est tombée malade, jusqu’à Berg – cette pomme blette ". La recherche musicale, telle qu’elle fut prônée à partir des années quarante, est-elle un modèle pour ce compositeur ? : " J’ai apprécié la musique de Messiaen, qui est l’un des grands compositeurs de ce siècle, mais je la trouve aujourd’hui trop triomphale – elle manque d’humilité. Je préfère la " simplicité " spirituelle de la musique Soufi ‑ juste une voix et une flûte". Aujourd’hui, John Tavener exploite de plus en plus des procédés de spatialisation, comme dans Annunciation (1992) : " Ce n’est pas seulement pour des raisons acoustiques, mais aussi parce que certains instruments symbolisent le ciel, d’autres les anges ou encore Saint Jean. Ainsi, leur place dans l’espace répond à des lois métaphysiques. Je suis étonné que peu de musiciens actuels songent à utiliser une diffusion spatialisée de leur musique. "
Un entretien avec John Tavener
Radio Classique
En 1995, le compositeur accordait un entretien au Monde de la Musique