LE BAROQUE AVEC ENTRAIN

Pour son second CD, le jeune violoncelliste réinvente l'ostentatoire virtuosité baroque.

Parce qu’il transforme un auteur en écrivain, le second roman est sans doute le plus difficile à écrire. De même pourrait-on dire que le second disque fait de l’instrumentiste un interprète. Après " Play ", un album " carte de visite " plus que prometteur avec le pianiste Pierre-Yves Hodique, Edgar Moreau s’affirme dans ces oeuvres concertantes du XVIIIe siècle comme un (jeune) maître. Mais c’est surtout sur le partenariat formé avec Roberto Minasi qu’il faut insister : chef et soliste respirent ici au même diapason stylistique.
Certes, " baroque " est la première épithète qui vienne à l’esprit en vertu d’un ensemble aux sonorités franches émaillées d’un clavecin imaginatif (accords tour à tour plaqués ou arpégés) et de phrasés soigneusement travaillés, mais elle n’est pas synonyme de sécheresse rhétorique. Écoutez l’Adagio du concerto de Haydn, raffiné et séducteur, accompagné telle une aria par Riccardo Minasi, ou la mélodie poétique sur la chanterelle du concerto de Boccherini avec ses contre-chants élégamment accentués. Dans le mouvement initial du concerto de Vivaldi, le soin apporté au timbre souligne ce que l’écriture du Prêtre roux peut avoir d’hallucinée. Une autre virtuosité, plus ostenatoire celle-là, ressort des finales joués avec une fougue et un entrain irrésistibles. Encore faut-il avoir les moyens de ses ambitions : aucune inquiétude avec Edgar Moreau qui allie rapidité des traits (les changements de positions sont effectués à une vitesse étourdissante) et intensité de l’expression. Du très " galant " concerto de Graziani enregistré en première mondiale, on retiendra le délicieux mouvement lent pourvu d’un suave accompagnement de pizzicato. Bravo !